Rédigé par Aboubacar Fofana et publié depuis
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François Gabart, la victoire d'une tête bien faite C.PLATIEU/REUTERS François Gabart avant le Vendée Globe, le 10 novembre 2012 PORTRAIT - Le Charentais devient le plus jeune vainqueur du Vendée Globe... Jusqu’au ponton d’arrivée, François Gabart avait comme d’habitude tout géré dans la retenue. La lente remontée du chenal, les retrouvailles émouvantes avec ses proches, la douche de champagne, les réponses en anglais au journaliste de CNN. Larmes maîtrisées, l’ingénieur contrôle. Et puis, le jeune marin de 29 ans a évoqué son bateau. «Moi j’ai pu me reposer. Mais lui a été à fond et a souffert tout le temps. Si je suis là, c’est grâce à lui», lâche-t-il des sanglots dans la voix. Le public acclame ce tandem et découvre l’homme derrière la carapace. Quand on se contente de la caricature, François Gabart peut être énervant. Toujours souriant, le Charentais blond sent bon l’air chaud des Alizées. A son arrivée, sur les quais des Sables d’Olonne, les spectatrices déploient des banderoles de demande en mariage. Plus jeune vainqueur du Vendée Globe pour sa première participation, le petit prince a pulvérisé le record de son maître Desjoyeaux. Tout réussit à Gabart. «Bien sûr, il a la tête bien faite d’ingénieur. Mais au-delà de cette image, il y a surtout une envie de naviguer. Et puis il aime travailler dans la bonne humeur », explique l’ancien participant, Roland Jourdain. «Au départ, quand on l’a quitté au large, il avait ce sourire figé aux lèvres, on s’est dit qu’il pouvait faire quelque chose. Il a des émotions mais il a l’habitude de vivre avec, il les gère », confie sa tante sur les pontons. «Quand on se plaint tout le temps, les ennuis restent avec toi.» Plongé à 6 ans dans la voile par ses parents lors d’une année sabbatique autour de l’Atlantique, Gabart fait ses gammes en voile olympique mais ne devient professionnel qu’il y a depuis quatre ans. Dès ses premiers pas, les vieux briscards flairent le jeune loup. Kito de Pavant l’embarque sur une transat, Michel Desjoyeaux sur un tour du monde en double. Sa connaissance de l’informatique et de la météo les étonne. Lui se nourrit de leur expérience avant de décrocher le grall en ces temps de crise économique : un sponsor qui lui finance un projet pour le Vendée Globe. Desjoyeaux le couve dans son écurie et lui conseille de ne pas trop en dire pendant la course, d’être stratégique. «Je n’étais pas convaincu, j’aime partager. Et puis, j’ai commencé à garder les choses. La course est devenue trop difficile pour que tu te permettes de donner des choses à l’adversaire», explique-t-il après avoir affiché pendant la course une perpétuelle bonne humeur. «Je suis quelqu’un de positif dans la vie. Quand on se plaint tout le temps, les ennuis restent avec toi.» 78 jours plus tard, il devance l'un des autres favoris, Armel Le Cléach. Les anciens l’adoubent. «J’aime sa pudeur, sa façon d’être surpris de tout ce qui lui arrive. Il me fait penser à moi lors de mon arrivée», se souvient Titouan Lamazou. Gabart affirme lui avoir appris. «On découvre des choses sur soi. Je ne pensais pas que j’avais cette énergie là pour répondre à l’enchaînement des problèmes. Et puis il ne faut pas s’inquiéter de faire des erreurs. On est des humains», glisse-t-il.