31 Décembre 2012
C'est un peu l'histoire de l'arroseur arrosé... Principal producteur au monde de terres rares, Pékin tente de redonner un peu de couleur à un marché qui subit de plein fouet la crise mondiale. Alors qu'il y a un peu plus d'un an la Chine organisait la pénurie afin d'asseoir son monopole, au prix de frictions importantes avec ses principaux partenaires commerciaux (dont le Japon et la Chine), aujourd'hui elle annonce reconduire sa politique de quotas afin d'essayer de maintenir ses revenus.
Le gouvernement chinois a en effet annoncé ce vendredi que les quotas d'exportation de terres rares pour le premier semestre 2013 seront fixés à un niveau similaire à celui de 2012. Concrètement, Pékin va autoriser l'exportation de 15.501 tonnes au premier semestre 2013, soit environ la moitié du total de 30.966 tonnes fixé cette année.
Des mesures qui pour l'heure ne permettent pas reellement aux cours des 17 metaux essentiels a la fabrication de nombreux produits de haute technologie (smartphones, ampoules a basse consommation) de se redresser. A titre d'exemple, le prix de l'oxyde de praseodymium-néodymium, utilisé pour les céramiques et les métaux magnétiques, a chuté à 300.000 yuans (48.000 dollars) la tonne, soit moins du quart de son plus haut niveau de 2011, selon l'agence officielle Chine Nouvelle.
Car du fait de la crise internationale, les quotas fixés s'avèrent toujours trop élevés pour inverser la tendance. Ainsi sur les 11 premiers mois de 2012, seulement 13.014 tonnes ont quitté le pays, selon les données fournies par les douanes. Alors que pour l'ensemble de l'année, la Chine avait accordé à ses 24 producteurs le droit d'exporter 30.184 tonnes, avant de relever légèrement le plafond à 30.996 tonnes en août.
Certains producteurs ont d'ailleurs pris des mesures drastiques a l'image du plus grand d'entre eux, Baotou Steel Rare-Earth , qui a annoncé en début de semaine qu'il allait prolonger la suspension d'une partie de sa production pour le troisième mois de suite.
«Le marché des terres rares a enregistré un léger redressement dans les deux mois qui ont suivi l'arrêt de la production (...). Mais il n'y a pas eu de renversement fondamental» de la tendance, a expliqué le groupe. Celui-ci avait annoncé le 23 octobre l'arrêt de la production dans la quasi totalité de ses unités, y compris celles situées dans la province du Jiangxi, à l'est du pays. En octobre dernier, l'entreprise avait enregistré une chute de près de 90% de ses profits nets au cours du troisième trimestre 2012.
Car la flambée des prix en 2011 (le cours du terbium a par exemple été multiplié par 9...) n'est plus qu'un rêve et Pékin voit non seulement une manne se raréfier mais doit aussi faire face à une concurrence accrue et au mécontentement croissant de ses clients qui dénoncent la position dominante de Pékin. Les Etats-Unis, l'Union europeenne et le Japon ont d'ailleurs porte plainte devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en mars dernier.
Et parallèlement ils cherchent à s'affranchir de la dépendance chinoise. Certains pays ont ainsi relancé l'exploration et ont rouvert d'anciennes mines. L'australien Lynas prévoit ainsi la mise en route l'an prochain d'un nouveau centre de production en Malaisie, le plus important situé hors de Chine. De son côté, l'américain Molycorp a redonné vie à la mine de Montain Pass en Californie, fermée en 2002. A terme, ces deux projets devraient représenter 25 % de la production mondiale.
Mais c'est surtout le Japon qui tente le plus de s'affranchir de son voisin . Le pays, qui importait 90 % de ses terres rares de Chine en 2009, prévoit cette année de n'en importer que 50 % et investit à long terme dans des projets d'extraction de terres rares sous-marines.
Par CLAUDE FOUQUET